Forum Social Local Paris 15eme

(8 novembre 2003)

Débat sur l'emploi: Quelles initiatives citoyennes pour développer l'emploi ?
Débat sur santé-protection sociale : Pour une société solidaire
débat sur Services Publics : comprendre et agir.

Débat sur l'emploi

Quelles initiatives citoyennes pour développer l'emploi ?

Après une introduction portant sur l'ampleur du chômage, ses conséquences et les pistes de réflexion à lancer au plan politique, un exemple d'initiative citoyenne a été présenté par l'association Solidarités Nouvelles face au chômage, illustré par un petit film montrant son action en matière d'accompagnement des chômeurs et de création d'emplois dans le secteur associatif grâce aux dons recueillis. Le débat a ensuite été ouvert par l'exposé d'un syndicaliste et représentant de l'association Résistances Sociales sur la destruction de l'emploi dans le secteur industriel. Il a continué avec les témoignages et prises de position des participants selon deux axes principaux :

1. Comment on devient chômeur en France

Un témoignage émanant d'une participante nous a montré comment on devient chômeur dans le secteur de l'informatique pendant qu'on vous prépare un remplaçant qu'on paiera moins cher et qui acceptera une amplitude horaire plus grande.

D'autres témoignages ou prises de position ont porté sur les thèmes suivants :

Comment on devient chômeur parce qu'en tant que femme, jeune, travailleur âgé ou travailleur immigré, on est considéré comme moins rentable économiquement

Comment on devient chômeur au nom des avantages comparatifs qui amènent les entreprises à délocaliser la production dans les pays à coûts de production les plus faibles dans un secteur économique donné

Comment on devient chômeur parce que les politiques successives ont volontairement réduit le volume des emplois disponibles en particulier dans le secteur industriel où près d'un million et demi d'emplois ont été supprimés en 20 ans tandis que la valeur ajoutée et donc la production nette par salarié était multipliée par 2,5

Comment on devient chômeur parce que, sous la pression du politique, les services publics ne recrutent plus et ne remplissent plus de ce fait leurs missions vis à vis des citoyens

Comment on devient chômeur quand les multiples formes de sous-traitance imposent une fragmentation du tissu des entreprises et entraînent une désyndicalisation avec une détérioration du rapport de forces dans les négociations professionnelles au détriment des salariés.

Comment sort-on du chômage ?

Dans le débat, ont été abordées les pistes de solution suivantes :

Il faudrait lier davantage les réflexions sur l'emploi aux réflexions sur l'organisation du travail et le partage du temps de travail

Il faudrait arrêter de baisser les charges sociales des entreprises sans contreparties

Il faudrait développer des unions syndicales locales et améliorer la prise en compte des associations par les syndicats

Il faudrait développer et multiplier les initiatives citoyennes de terrain en faveur de l'emploi portées par le milieu associatif, même si leur portée est limitée, et en se donnant comme objectif de peser sur le débat public

Il faudrait promouvoir et défendre les modalités d'indemnisation et de réinsertion qui ne condamnent pas le chômeur à la précarité tout en donnant aux entreprises une main d'oeuvre à très bon marché comme cela risque d'être le cas avec des dispositifs comme le RMA

En tant que citoyen, il faut devenir un acteur soucieux d'articuler les différents niveaux d'action au plan local, national, européen et mondial.

Sont intervenues dans le débat en qualité de personnes-ressource :

Lucien JALLAMION et Jacques DECAUX, syndicalistes et membres fondateurs de l'association Résistances sociales ;
Olivier BERTRAND de l'association Solidarités Nouvelles Face au Chômage (SNC)

Les membres* du groupe organisateur du débat sur l'emploi et rédacteurs de cette synthèse considèrent qu'il est indispensable de continuer à réfléchir sur les moyens de lutter contre le chômage et la précarité au plan local, souhaitent associer le maximum de jeunes à cette réflexion et se déclarent prêts à dépasser les clivages politiques et organisationnels pour avancer sur le sujet.

* Jacqueline Crespy, Martine Ferrand, Marie-Jeanne Gaxie, Stéphane Landry, Paule Marx, Annie Poirier.


Pour une société solidaire

Compte-rendu du débat santé-protection sociale

Canicule : ne plus vivre un tel drame

Notre système public de santé a été sérieusement ébranlé avec le drame de l'été dernier : quelque 15 000 décès recensés au plan national en août dernier sous l'effet de la canicule ; 2290 décès à  Paris contre 1175 en 2002, soit le double de l'an passé. Parmi les victimes, un grand nombre de personnes âgées à domicile, en maisons de retraite et à l'hôpital.

Sans attendre les résultats de la mission d'évaluation conduite par la Mairie de Paris pour connaître les multiples causes de cette tragédie et en tirer des enseignements pour lŒavenir, une première conclusion s'impose avec force  pour les participants à ce débat. Ce drame révèle à l'évidence les dysfonctionnements graves du système de santé avec la  saturation des services, les difficultés de coordination des acteurs et de mise en ¦uvre des dispositifs d'alerte.

Cela est d'autant plus insupportable pour l'opinion que les responsables pouvaient difficilement ignorer les risques  encourus, alertés régulièrement par les professionnels de santé et leurs associations professionnelles. Le plus inquiétant, peut-être, est qu'avec  l'hiver, nous ne sommes pas à l'abri de nouvelles défaillances. Ainsi le retard dans la mise en place du plan anti bronchiolite, faute de crédits, est un signal inquiétant qui doit nous rendre vigilants sur les risques encourus par les jeunes enfants.

Il est noté une carence en dispositifs sanitaires de proximité, tels que les dispensaires,  qui permettraient davantage de prévention et de dépistage .

La remise en cause insidieuse du droit à la santé pour tous

La diminution de la capacité d'accueil est patente ces dernières années : plusieurs témoignages ont souligné l'impact de la fermeture des lits d'hôpital en été ou de certains services comme celui des urgences pédiatriques à Necker début août. La sous médicalisation des maisons de retraite comme l'insuffisance des services gériatriques et des services de soins à domicile ont été également soulignés. Plus globalement la fermeture des écoles d'infirmières se poursuit alors que l'on sait qu'un plan de rattrapage de 10 ans serait d'ores été déjà nécessaire si l'on voulait combler le seul déficit observé dans cette catégorie de personnel estimé entre 12 000 et 20 000 postes. La carence des effectifs d'aides soignantes est aussi de notoriété publique.

Les conditions de travail des salariés des services de santé se dégradent. Plusieurs témoignages ont fait état de la fréquence des heures supplémentaires dans les hôpitaux et de la réalité des gardes de 48 heures pour les internes hors de toute norme légale. De même, l'hôpital public ne saurait pas fonctionner aujourd'hui sans la présence de médecins étrangers moins bien payés qui assurent par exemple au moins 50% des gardes de nuit.   

D'autres tendances lourdes apparaissent comme l'a souligné un participant évoquant les difficultés croissantes de mener une politique de prévention digne de ce nom dans les entreprises, en raison de la diminution des services de soins de proximité. Les comités d'hygiène et de sécurité eux-mêmes n'ont pas toujours les pouvoirs réels de faire corriger les défaillances constatées en ce domaine. Plus généralement la prévention tend à devenir le parent pauvre de la médecine du travail.

Préserver le " bien public santé" : un enjeu pour une société solidaire

Au delà des difficultés rencontrées par l'hôpital public,  c'est bien l'ensemble du système public de santé qui est en crise. On ne peut espérer y répondre que dans le cadre d'une vision intégrée, qui reconnaisse la santé comme un droit pour tous, comme un bien public accessible à tous. Adopter cette perspective globale suppose  la mise à jour de certaines questions concernant tant les acteurs que les modes de financement.

L'une de ces questions est la place que l'on entend donner aux usagers dans ce système et donc celle de leur représentation. Elle est loin d'être tranchée selon un des participants.

Promouvoir une politique de santé solidaire suppose d'affronter de sérieux défis posés par l'actualité du débat budgétaire.  Premier défi, celui de l'égalité dans l'accès aux soins. Elle reste aléatoire pour les plus démunis  avec les récentes mesures concernant l'augmentation du forfait hospitalier  qui, gelé depuis 1996 passera de 10, 67 à 13 euros par jour en 2004 et touchera en premier lieu les bénéficiaires du minimum vieillesse et de l'allocation adulte handicapé. Même effet prévisible de la fin prévue de la prise en charge automatique à 100% pour les patients en affection de longue durée.

Il en est de même avec la diminution de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) ou encore les coups portés contre la Couverture médicale universelle (CMU) du fait du désengagement financier de l'Etat annoncé dans le projet de loi de finances pour 2004. Or l'accès aux soins de cinq millions de personnes en grande précarité en dépend. Il y a là incontestablement un risque fort de discrimination et de système de soins à deux vitesses. Une des pistes de réflexion proposées pour enrayer cette évolution serait de promouvoir une CMU couvrant à 100 % des soins utiles et nécessaires.

Autre question soulevée dans le débat, celle des lobbies pharmaceutiques dont l'influence souvent méconnue ne doit pas être sous estimée par l'ensemble des autres acteurs de la société. Trois exemples en ont été donnés. Ainsi l'arme des budgets publicitaires sur les revues médicales qui pèse sur le droit à l'information. Exemple moins connu, tiré de l'actualité, le marchandage permanent et non public des Agences de médicament avec les laboratoires. Il aboutit à la quasi liberté de fixation de prix des nouveaux produits mis sur le marché en compensation de la publication de listes de médicaments déremboursés ou moins bien remboursés. Est également mentionné le lien ambigu entre ces laboratoires privés et les laboratoires publics de recherche (INSERM), qui contre financement, délaissent la recherche fondamentale au profit d'études applicatives sur des produits commercialisés par ces mêmes laboratoires privés, au moindre coût pour ceux-ci.

Les politiques de déremboursements des médicaments jugés inefficaces posent directement par ailleurs la question de la liberté de choix des malades sur les prescriptions (homéopathie par exemple). Elle est un biais par lequel on peut aborder la place que l'on entend donner aux usagers dans le système de soins et donc de leur représentation. Comme l'a souligné l'un des participants elle est loin d'être tranchée.

Enfin le débat a permis de soulever une autre question sur l'avenir du système de santé liées aux réponses financières retenues pour maîtriser les dépenses. Elle concerne le choix des outils d'évaluation des activités des médecins qui doit être abordée dans une optique plus large qu'une simple approche comptable.

Pour un financement solidaire de notre protection sociale

Cette question du financement solidaire a un impact direct sur l'avenir du modèle de protection sociale que nous entendons promouvoir et renforcer pour faire face à l'évolution des différents risques. Elle s'impose comme un choix de société dans un pays où un actif sur six se trouve en situation précaire. Elle vient d'être relancée brutalement avec le débat sur le nouveau risque dépendance et handicap lancé par le plan gouvernemental. Son orientation n'est pas la nôtre. Il entend en effet financer l'aide aux personnes dépendantes de façon inégalitaire et non solidaire par une journée de travail supplémentaire des salariés et par l'épargne des ménages dont on sait que la majeure partie est le fait des salariés, tout en exonérant les professions libérales, artisans et les agriculteurs pour raisons électorales.

Au delà de l'actualité, nombreux ont été les participants à souligner que le défi majeur est celui posé par la tendance de fond de déporter une part croissante des dépenses de santé sur le financement par les mutuelles dont la montée en charge s'accroît. Plus généralement on assiste à une évolution où les salariés sont poussés à une gestion individuelle des risques. Il a été rapporté ainsi que l'extension observée des cliniques privées soumises aux fortes exigences de leurs actionnaires, certains établissements étant déjà côtés en Bourse, est un facteur qui stimule la tendance forte à mettre en place des systèmes de protection complémentaire plus onéreuses à l'image de ce que l'on observe aux Etats-Unis.

Cette optique libérale tourne le dos à la conception solidaire partagée par les participants. Elle appelle à une vigilance forte et constante et se joue tant au niveau du débat public que sur lieux de travail.

Ainsi dans les entreprises, les négociations sur la mise en place des systèmes complémentaires de prévoyance obligatoire révèlent comme l'a rapporté un syndicaliste des débats serrés sur le type de risques couverts, leur niveau de prise en charge, car il sont abordés par les employeurs dans une logique libérale privée qui poussent à l'adoption de modèles différenciés selon la situation des bénéficiaires .

Défendre notre droit à la santé et promouvoir une protection sociale pour tous dans une optique solidaire reste plus que jamais un impératif quotidien pour les citoyens du 15ème. A nous de nous en saisir.


Services Publics, comprendre et agir.

Débat fait en 2 parties :

1 - Film : "Quelque chose de notre histoire", de Jean Druon. Durée = 1h30
Ce film, sur l'histoire de la dérégulation des télécommunications en Europe, a permis de lancer le débat, notamment sur le rôle de l'Europe et des gouvernants, et celui, impuissant, des citoyens qui ont eu peu de prise sur ce processus présenté comme inéluctable.
Ce film a également conduit à se positionner lors du débat sur le vaste sujet de la privatisation des services publics car il s'agissait d'un film d'opinion, parfois très tranchée.

2 - Débat : durée 1h20.

Les principaux points suivants sont revenus lors des interventions des participants au débat, qui méritent d'être adressés au FSE :

3 - Conclusion faite à l'issue du débat, à chaud :

Ce vaste sujet mériterait de bénéficier d'un large débat et cela est une piste pour continuer dans le cadre du Forum Social Local 15ème.